La magia africana

[Questo excursus di Pierre Fontaine nella magia africana è un testo da prendere con beneficio d'inventario. L'autore non è un antropologo ma un giornalista che aderisce a una visione alla padre Schmidt dello sviluppo della religione e della magia (una sorta di antica sapienza magico-religiosa monoteista che si sarebbe poi degradata e dispersa in mille rivoli). Non è un caso che abbia trovato il libro presso una libreria di testi esoterici (ma l'opera è reperibile anche online in versione pdf). La lettura comunque è interessante e lo stesso Carlo Tullio-Altan nel suo primo testo antropologico sulla religione primitiva rimandava a questo repertorio di exempla per avere un'idea di cosa fosse la magia africana. Del resto molti casi sono tratti dalle testimonianze di studiosi o missionari citati anche da De Martino nei sui lavori sulla magia: Trilles, Spencer e Gillen, ecc.]


Il trasferimento di una malattia da un uomo a un animale o un albero

Lorsque les scènes rituelles sont terminées et que les mauvaises influences sont censées être écartées du malade, une autre scène se déroule, plus hallucinante, plus prodigieuse. Il s’agit de faire passer la maladie d’un être humain dans le corps d’un animal. Le R. P. Trilles la décrit succinctement :

Pour guérir les maladies, le médecin primitif a chanté d’abord son incantation, puis il l’a récitée et, enfin..., il a dansé jusqu’à ce que le danseur soit complètement épuisé. Parfois, à ce moment, a lieu le transfert de la fièvre du malade dans un animal ou un arbre (15). Cérémonie des plus étranges, où l’on voit, sous l’influence des passes magiques, le malade se calmer peu à peu, puis, après une sueur abondante, s’endormir doucement, tandis que l’animal tremble, gémit, puis se couche à terre et meurt souvent, agité par des frissons convulsifs d’abord, puis raidi soudain et tombant comme une masse. C’est, dans ce cas, ordinairement un cabri, souvent aussi le chien préféré du malade. » 

Le missionnaire du Saint-Esprit relate un cas précis de « transfert » de la maladie d’un être humain dans un végétal :

« ... Ainsi avons-nous vu opérer un féticheur fang. Un de nos catéchistes, Paul Nsoh, était atteint d’une fièvre algide, dite des bois, très grave. Quinine impuissante. Le féticheur le fit transporter sous un arbre (mpala) à larges feuilles, puis exécuta les passes rituelles sur le malade d’abord, puis sur l’arbre. Bientôt les feuilles de celui-ci commencèrent à s’agiter, puis noircir et tomber. Sudation abondante du malade. Le lendemain il était guéri. »

Nous voici en face de réalisations très précises de la magie africaine : le passage d’une maladie grave d’un corps humain chargés d’oripeaux rituels, qui vont prendre en charge le malade pour essayer de le guérir et qui vont commencer le traitement par un vaste déploiement de moyens magiques destinés à lutter contre les esprits malfaisants causes de la maladie dans un végétal ou un animal, et la guérison définitive du malade. Si cette opération fétichiste ne réussit pas à chaque fois, elle donne un résultat positif dans la plupart des cas. 

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(15) Méthode classique du tranfert qui se pratique des nos jours en Europe.

[pp.41-42]


La giustificazione di un sacrificio umano da parte di uno stregone

A la suite d’une séance particulièrement mouvementée qui nous a révolté (il s’agissait de faire avaler le poison d’épreuve à un Noir présumé coupable), nous avons posé la question suivante au féticheur guinéen Ngoulouni (Guinée espagnole) :

« Pourquoi, toi qui peux faire des actes généreux par tes pouvoirs surnaturels, t’abaisses-tu à tuer les hommes avec l’ordalie, alors que toi-même n’aurais pas résisté à la nocivité du poison d’épreuve ? »

Ngoulouni tripota sa ceinture garnie de multiples amulettes et nous regarda bien en face après avoir prié l’interprète indigène de quitter la case, notre ami le colon blanc parlant fort bien son dialecte. Voici les paroles que l’on nous traduisit :

« Nous ne sommes pas entourés que d’hommes bons ; la méchanceté règne aussi sur la terre. Les esprits qui nous environnent, qui nous surveillent, sont donc aussi bons ou méchants suivant les corps matériels qu’ils ont habités. Les bons esprits nous aident dans nos actions bienveillantes, les mauvais esprits nous aident dans nos actions malveillantes lorsque nous les invoquons.
— Alors, n’invoque pas les mauvais esprits !
— Le féticheur perdrait rapidement la considération de ses frères s’il ne punissait pas autant qu’il guérit.
— Explique-toi.
Il faut parfois sacrifier un homme, même innocent, pour en sauver cent. La mort d’un Noir est profitable à celle de cent Noirs. Parfois la malchance s’acharne sur un village ; la récolte est détruite, les troupeaux se déciment, le stégomia ou la tsé-tsé (41) causent de grands ravages. Les hommes perdent courage, ils ont peur, ils se résignent. Ils offrent alors un terrain propice au malheur, car, sous notre climat, le moral est nécessaire pour lutter contre les embûches de la nature. Ils croient que les esprits malfaisants s’acharnent sur eux et qu’ils ne pourront les vaincre ; ils attendent la mort et ne cherchent plus à lutter. Il faut trouver le moyen de leur redonner courage...
— Mais l’homme qui vient de mourir était innocent !
— Peut-être as-tu raison. Depuis une lune les hommes du village ne vont plus à la chasse et la récolte n’est pas encore mûre. Trois fois ils sont partis malgré les présages défavorables ; en trois sorties nous avons compté neuf morts. Les esprits continuent à prédire des malheurs, les chasseurs ont peur, ils ne veulent plus prendre leurs zagaies et leurs arcs. Les vieillards, les femmes et les enfants n’ont plus rien à manger. Hier tu as tué deux antilopes ; les Noirs ont mangé la chair avec voracité, mais refusent de considérer ta chasse comme une intervention des bons esprits en leur faveur. Il faut sortir de cette situation qui menace le village...

(A partir de ce moment, nous écoutons très vraisemblablement une fable destinée à justifier le meurtre que nous venons de voir commettre, mais une fable inspirée par une psychologie assez poussée et que nous n’avons pas le courage de condamner eu égard au sort d’un village de cinq cents habitants.) « J’ai interrogé les esprits, continua Ngoulouni, ils m’ont indiqué que tout le mal venait d’un Noir habité par l’esprit malfaisant. L’homme a été saisi, il a refusé d’avouer devant le clan qui a décidé de lui infliger le poison d’épreuve. Il est tombé foudroyé, il était donc coupable. Maintenant, le village est délivré du mauvais sort. Regarde autour de toi, les chasseurs préparent leurs armes ; tout à l’heure ils viendront tremper leurs fers dans le poison que je vais préparer et demain à l’aube, ils partiront dans la forêt. »

Ngoulouni s’arrêta un moment et ajouta :

« Il fallait leur redonner confiance en eux-mêmes !
— Mais un homme est mort, il était peut-être innocent ! »

Le féticheur haussa les épaules :

« Les esprits ont parlé... Et puis, as-tu remarqué que l’homme habité par le mauvais esprit était un infirme ? Il boitait, il s’était cassé la jambe en tombant d’un arbre... La disparition d’un infirme n’est jamais une grande perte... »

Lorsque, huit jours après, en revenant sur nos pas, nous repassons par le village de Ngoulouni, nous apprenons que la chasse a été bonne, que la confiance et l’optimisme refleurissent, bref que tout va mieux, presque bien. Ngoulouni, spontanément, fait fétiche pour la bonne continuation de notre voyage en disant, lorsque nous prenons congé de lui :

« C’est peut-être votre halte dans le village qui a chassé le mauvais esprit qui pesait sur nous et qui a vaincu le sortilège...
— Alors, pourquoi le poison d’épreuve et un cadavre ?
— Les chasseurs n’auraient pas compris que la présence de Blancs soit assez forte pour intervenir en leur faveur... »
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(41). Le « moustique » stegomia provoque la fièvre jaune, et la mouche tsé-tsé, la maladie du sommeil.

[pp. 120-122]


Pierre Fontaine, La magie chez les Noirs, Dervy, 1949. [sottolineatura mia]

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