L'importanza sociale del divertimento nell'Ancien Régime

[...] du Moyen Age au XVIIIe siècle, on aima représenter des scènes de jeux : indice de la place du divertissement dans la vie sociale de l’Ancien Régime [...] 
 
Nous avons de la peine à imaginer l’importance des jeux et des fêtes dans l’ancienne société, aujourd’hui où il n’existe pour l’homme des cités ou des campagnes, qu’une marge très rétrécie entre une activité professionnelle, laborieuse, hypertrophiée, et une vocation familiale impérieuse et exclusive. Toute la littérature politique et sociale, reflet de l’opinion contemporaine, traite des conditions de vie et des conditions de travail ; un syndicalisme qui protège les salaires réels, des assurances qui allègent le risque de la maladie et du chômage, telles sont les principales conquêtes populaires, au moins les plus apparentes dans l’opinion, la littérature, l’argumentation politique. Même les retraites deviennent de moins en moins des possibilités de repos, et plutôt des privilèges permettant des cumuls fructueux. Le divertissement, devenu quasi honteux, n’est plus admis qu’à de rares intervalles, presque clandestins : il ne s’impose comme fait de mœurs qu’une fois par an, dans l’immense exode du mois d’août qui entraîne vers les plages et les montagnes, vers l’eau, l’air et le soleil, une masse toujours plus nombreuse, plus populaire et en même temps plus motorisée.

Dans l’ancienne société le travail n’occupait pas autant de temps dans la journée, ni d’importance dans l’opinion ; il n’avait pas la valeur existentielle que nous lui accordons depuis plus d’un siècle. A peine peut-on dire qu’il avait le même sens. Par contre les jeux, les divertissements s’étendaient bien au-delà des moments furtifs que nous leur abandonnons : ils formaient l’un des principaux moyens dont disposait une société pour resserrer ses liens collectifs, pour se sentir ensemble. Il en était ainsi de presque tous les jeux, mais ce rôle social apparaît mieux dans les grandes fêtes saisonnières et coutumières. Elles avaient lieu à des dates fixes du calendrier, et leurs programmes suivaient dans leurs grandes lignes des règles traditionnelles. Elles n’ont été étudiées que par des spécialistes du folklore ou des traditions populaires, qui les situent dans un milieu trop exclusivement rural. Elles intéressent au contraire la société tout entière dont elles manifestent périodiquement la vitalité.
 
 
Philippe Ariès, L'enfant et la vie familiale sous l'Ancien Régime, Éditions du Seuil, 1975, brani. tratti dalla parte I, cap. 4: Petite contribution à l’histoire des jeux, sottolineature mie.

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